LA CLERMONT

 

Au milieu des années 60, nous étions alors dans la période qu’on appelle maintenant « les 30 glorieuses » ; comme beaucoup, j’étais admiratif devant les véhicules faisant partie de la modernisation de notre pays. La DS Citroën, la Caravelle d’Air France, le camion Berliet Stradair, le paquebot France… Dans tous les domaines les innovations foisonnaient. Côté ferroviaire, dans l’hebdomadaire  « La vie du rail » que me passait mon oncle Emile, je découvris un nouvel autorail indissociable de sa remorque. Ses formes étaient plutôt « au carré » et simplistes en comparaison avec les autres appareils plus anciens, mais son allure résolument nouvelle avec ses grands pare-brises « panoramiques » me plaisait. « Nous n’aimons pas assez la joie de voir de belles choses neuves », et lorsqu’on est enfant on ne s’en prive pas.
     Si les EAD - dont les premiers exemplaires sortirent en 1963 et qui furent construits en grand nombre pendant une dizaine d’années - étaient présents dans de nombreuses régions, on n’en voyait que très peu en Jura. Deux passages chaque jour me permettaient d’en voir en gare de Dole, c’était la liaison Besançon – Clermont-Ferrand (par Dole, Dijon, Montchanin, Paray-le-Monial, Moulins) dans les deux sens. Etant cheminot au début des années 70, je me souviens que nous la désignions comme « La Clermont ». C’était pour moi les seules occasions de voyager dans ces appareils, entre Dole et Dijon.  Pour le reste, il est vrai que gravir les rampes de lignes montagneuses n’était pas leur fort, et pour ça il y  avait ce qu’il fallait, à savoir les ABJ et De Dietrich du centre autorails de Besançon, épaulés par les « Picasso » et 2800 de Lyon-Vaise. Cela jusqu’au milieu des années 70 lorsque le centre autorails bisontin fut fermé et ses ABJ et De Dietrich ferraillés. Les EAD les remplacèrent alors sur « La Bosse », où ils eurent quelquefois un peu de mal à rallier Pontarlier par temps de neige…
     La liaison Besançon – Clermont-Ferrand fut ensuite assurée par des « turbotrains », mais on l’appelait toujours « La Clermont ».
    
     Je reconnais la nécessité de mieux protéger les conducteurs des projectiles lâchés depuis des ponts par d’infâmes abrutis (je ne peux nommer autrement un tel acte que par « tentative d’assassinat gratuit »). Mais à mes yeux la réduction de la surface vitrée frontale fit s’évanouir le design qui me plaisait, son aspect « futuriste ». Depuis, ces appareils étaient devenus pour moi tout à fait banals, je les trouvais fonctionnels et sans grâce, au même titre que des rames de métro (et à présent les matériels roulants apparus depuis les années 90).
     Ne vous étonnez donc pas de me voir passer toutes ces heures sur mon vieux modèle Jouef pour lui redonner l’aspect des engins des premières séries. Je vois déjà la question sur les lèvres de ceux qui ne tiennent pas compte de ma démarche, (clairement exposée sur ce site) : « Pourquoi tu t’achètes pas l’EAD de la marque XXX, puisqu’elle le propose, d’une très belle facture ? »
Et bien je réponds encore que je ne trouve pas grand intérêt à accumuler des modèles sur lesquels il n’y a rien à faire (ils sont beaux oui, pis après ?) J’adore transformer et améliorer d’anciens modèles. C’est ma vie, ça ne me lâchera que lorsque mes yeux et/ou mes mains ne suivront plus. « Si vous êtes comme ci, téléphonez-mi, si vous êtes comme ça, téléphonez-moi » (pour vous mettre dans l’ambiance des années 60, lorsque les EAD n’avaient pas encore le toit rouge).  

 
LES OPÉRATIONS RÉALISÉES SUR MON EAD JOUEF

     Le traitement et la peinture des belles carrosseries demande un soin particulier et n’est pas mon domaine d’intervention habituel. Je me suis donc limité aux modifications importantes, et me suis sagement abstenu de tenter celles des grilles d’aération sur la caisse de la motrice. Par exemple, il faudrait supprimer, du côté gauche, la partie de grille d’aération du bas, dans la zone peinte en rouge. Mais à la place il faudrait ensuite refaire cette surface avec la continuité des bandes en relief, et là je ne me sens pas capable de parvenir à un résultat satisfaisant, alors : « laisse-béton ».
     J’ai établi mon propre « cahier des charges » avec - dans l’ordre d’importance -  les opérations suivantes :    

  1. - Moto-transmission plus performante. Comme plusieurs de mes clients m’avaient rapporté qu’ils l’avaient fait avec bonheur, j’ai adapté un bogie moteur MECANIC TRAINS pour Picasso Jouef que je proposais jusqu’en 2007. Prévoyant, j’en avais réservé un à cet effet dans la boîte de rangement de mon EAD.
  2. – Remplacement des roues. Bien sûr, j’avais également provisionné les roues M.T. nécessaires. On peut commander des roues d’autorail X 2800 ou RGP, par internet au S.A.V. Roco à l’adresse webshop@roco.cc     
  3. – Découpe des pare-brises et confection de nouveaux, « panoramiques »
  4. – Remplacement des vitrages par des pièces en plexi fraisé Apocopa
  5. -  Ponçage des toitures, suppression des feux rouges à côté des phares
  6. – Peinture conforme aux couleurs d’origine
  7. – Aménagements intérieurs : cloisons, banquettes en salles 2ème classe et sièges en salle 1ère classe
  8. – Eclairage par LED dans les phares et aux plafonds

     Pour ces transformations, je me suis inspiré de l’article de Bernard Canet dans « Voies Ferrées » N°80 et 82, de photos dans plusieurs tomes en ma possession des livres de la série « Images de trains », de l’article paru dans « La vie du rail » en 1964 consacré à la sortie des premiers EAD, de « Ferrovissimo » N° 16 et du hors-série « Le Train ».
     J’ai également bénéficié de conseils et de l’aide d’amis qui m’ont fourni des documents (plans et photos des aménagements intérieurs…) Remerciements à Gaby Bachet, Christophe Dufrenoy, Jeremy Hebras, Robert Martorano et  Jean-Pierre Lescure.
      
                                                       Eric Seibel – mars 2019

 
LES OPÉRATIONS PAS À PAS

Attention, le récit de ces transformations est bâti avec la succession chronologique de photos prises au fur et à mesure des opérations. De ce fait, des solutions adoptées en premier lieu se sont parfois avérées mauvaises. Soit la première méthode expérimentée a été remplacée par une autre, soit son application est restée, mais au final je recommande à ceux qui voudraient modifier leur EAD Jouef de procéder autrement. Mais dans tous les cas ce que j’ai fait et parfois refait ensuite est resté. Il s’agit bien du récit d’une expérience, alors regardez bien tout avant de vous lancer…

 

1 et 2 – Ponçage des toitures, découpe des pare-brises, arasage des contours en relief des fenêtres et des feux rouges, remise en peinture couleur « ivoire » de l’ensemble.

 
3 à 7 -  Adaptation du bogie moteur M.T., remplacement des roues. J’ai souhaité n’utiliser que des roues lisses, mais par la suite vous verrez que j’ai dû quand même remplacer celles d’un essieu par des roues munies d’anneau d’adhérence.
 
8 et 9 – Préparation des aménagements intérieurs des salles 2ème classe, avec des éléments récupérés dans des voitures voyageurs. Les banquettes doivent être à 3 places d’un côté et 2 de l’autre.
 
10 à 17 – « Habillage » du bogie avec des éléments découpés sur celui du modèle d’origine, et pose de palpeurs de courant sur les 4 roues.
 
18 à 20 – Préparation du bogie arrière, sur la base de celui en laiton massif de l’ancien kit M.T. pour Picasso, et équipé de timoneries et palpeurs de courant comme le bogie moteur.
 
21 – Les fils des palpeurs de courant du bogie arrière passent sous le bloc des banquettes (amovible) et rejoignent ceux du bogie moteur dans le compartiment à bagages.
 
22 et 23 – Ajustement du châssis muni du nouvel aménagement intérieur avec la caisse.
 
24 et 25 – Préparation des banquettes de 2ème classe, cette fois pour la salle de la remorque, de la même façon que celle de la motrice : découpe de la forme en creux arrondi dans les coins des dossiers.
 
26 – Perçage (Diam. 0.5 mm) des trous (profondeur = 3 mm) au milieu du dossier des banquettes : près du bord extérieur en haut, et près du plancher en bas côté intérieur.
 
27 et 28 – Confection et pose dans ces trous de ces petites pièces en fil maillechort (Diam. 0.4 mm) pour représenter les tubes qui contournent ces banquettes.
 
29 et 30 -  Dans la remorque, l’aménagement est composé d’une salle 2ème classe et d’une salle 1ère classe de 24 places comme j’ai choisi (il existait aussi des remorques avec seulement 12 places en 1ère). Les sièges 1ère classe, comme je l’ai fait, peuvent être constitués de ceux d’origine (scier leur plancher, trop d’écart).
 
31 à 33 – Réutilisation également de cloisons de séparations et toilettes. Les aménagements sur les parties hautes du châssis y sont collés, ceux situés au-dessus des parties basses y sont emboîtés et restent amovibles.
 
34 – Peinture et pose de figurines Preiser.
 
35 et 36 – Masquages en vue du passage en peinture rouge. Christophe d’AMF 87 m’a conseillé et fourni ces bandes adhésives, idéales pour ça.
 
37 – Il m’a aussi conseillé d’utiliser un emporte-pièces pour la découpe de la bande autour des phares. J’en ai un de diamètre 5 mm qui, après affûtage, m’a bien été utile.
 
38 et 39  -  Passage en peinture rouge.
 
40 et 41 – Le résultat. Ouf, pas trop mal ; une étape importante de franchie pour moi !
 
42 – Mesure et découpe des pare-brises dans du rhodoïd. Après cintrage des côtés, je tente de leur imposer de garder leurs arrondis en les maintenant avec des élastiques (sans grand succès…).
 
43 – Pour représenter les renforts verticaux intérieurs, je colle des bandes d’aluminium autocollant. J’abandonne cette méthode, car à l’observation des photos ces renforts apparaissent noirs, la couleur aluminium ne rend pas bien. Je trace simplement des traits à l’intérieur avec un marqueur noir permanent, comme le suggérait Bernard Canet dans son article dans Voies Ferrée.
 
44 et 45 – Afin d’obtenir un collage solide avec un minimum de produit, j’utilise cette résine époxy qui prend en 5 minutes (on n’en trouve pas en grandes surfaces, même de bricolage, mais dans les magasins de loisirs créatifs, ex. « Cultura »).
 
46 et 47 -  Le résultat. Encore une frayeur appartenant au passé ! Le jonc entourant les pare-brises est réalisé avec les contours de la planche d’entourages de fenêtres autocollants, livrée avec les vitrages Apocopa.
 
48 à 50 – Collage de LED prolongées d’un « canon » cylindrique de diamètre 1. 8 mm dans les phares. Je choisis de poser des blanches (ton chaud) dans ceux de l’avant de la motrice (là où je mettrai le conducteur), et des rouges dans ceux de l’arrière de la remorque.
 
51 et 52 – Fabrication et collage de bandes de carton aux plafonds, équipées de LED (blanc ton chaud) sans « canon » au bout.
 
53 – Equipement des faces avant : pose de tampons M.T. Réf. T 10, d’attelages factices Réf. att 05, ½ accouplement de freins Réf. att 02, prise « Kéops » Réf. div 86, supports de fanaux Réf. div 69 et cerclages de phares Réf. fan 14a).
 
54 – Préparation de cloisons et pupitre de conduite en carton mince, collage d’un conducteur côté motrice et d’un extincteur sur les cloisons.
 

55 – Pose des cloisons et pupitre dans les cabines, par collage.

 
56 et 57  - Préparation des bogies de la remorque, montage.
 

58 – Premier essai avec la remorque attelée = « essuyage de pieds » magistral !
Même en bourrant de lest le compartiment à bagages, ça patine encore…

J’abandonne l’idée de « toutes roues lisses », et échange celles du 2ème essieu du bogie moteur par des roues munies de « pneu » d’adhérence.

 
59 – Nouvel essai, c’est insuffisant. Plutôt qu’équiper l’autre essieu de roues « à pneu », ce qui rendrait inopérants les palpeurs de courant du bogie moteur, je colle un lest d’environ 30/40 grammes sur le moteur, centré au droit du 2ème essieu, et l’adhérence devient suffisante.
 
60 et 61 – J’avais prévu que dans l’ordre d’assemblage les toitures seraient emboîtées en dernier, et donc placé le raccordement des micro-connecteurs à hauteur des plafonds, ce qui me permettait de mettre les fils en position telle qu’ils ne se voient pas à travers des fenêtres (désormais parfaitement transparentes !)
Hélas, les toitures ne plaquaient pas correctement sur les carrosseries. Sans séparation de couleurs rouge/crème comme à l’origine sur le modèle, « on ne voit que ça ! ».
 
62 – J’ai compris pourquoi : au-dessus de certaines fenêtres, les taquets de fermeture venaient buter contre le contour du nouveau vitrage. Que faire ? Décoller ces vitrages, réduire leur bordure supérieure, puis les recoller ? Houlà, plutôt que risquer de tout salir, j’ai préféré diminuer un peu la longueur des taquets.
 
63 – Bon, là ça va mieux mais au-dessus des cabines « ça r’bique » quand même. Je décide de coller les toitures à ces endroits, c’est d’ailleurs ce que conseillait Bernard Canet. Pour le branchement des micro-connecteurs avant assemblage, je pose la caisse juste à côté du châssis ; tant pis pour la position des fils…
 
64 à 66 – Préparation et pose d’un timon d’attelage entre motrice et remorque.
 
67 à 69 – Découpe et collage de rideaux derrière les fenêtres, en papier crépon. Les coupons sont orientés avec leurs micro-plis à la verticale.
 
70 et 71 – A l’origine le bon positionnement et le maintien de l’assemblage châssis/caisse était assuré par l’emboîtement des fenêtres.
A présent, confection et pose de petites équerres en laiton avec écrou de 2 mm soudé. Ces pièces sont solidement collées à l’arrière des châssis avec de la résine époxy, ce qui me permet d’utiliser des trous existants sur les faces arrières des caisses pour les vis d’assemblage (j’avais percé ces trous dans les années 80 pour y passer les fils reliant les deux éléments pour la continuité électrique).
 
72 – Avant l’assemblage, les châssis et les caisses sont placés côte à côte pour brancher les micro-connecteurs d’éclairage (je ne peux plus le faire par au-dessus puisque j’ai collé les toitures).
 
73 – Enfin, pose des décalcomanies de numérotation et de classes.
 
 
 
 
ACCESSOIRES UTILISÉS

MÉCANIC TRAINS :

  • Kit de re-motorisation d’autorail Picasso, mais qui n’est plus au catalogue depuis avril 2007. On peut tout aussi bien utiliser des pièces d’autres provenance

  • Roues d’autorails : idem. Utiliser des roues d’autorails et RGP Roco

  • Aérateurs de toitures d’autorails Réf. div 68

  • tampons M.T. Réf. T 10

  • attelages factices Réf. att 05

  • ½ accouplement de freins Réf. att 02

  • prises « Kéops » Réf. div 86

  • supports de fanaux Réf. div 69

  • cerclages de phares Réf. fan 14a)

  • Essuies-glaces Réf. div 101

APOCOPE :

  • Vitrages en plexiglass fraisé, Réf. 02

AMF 87 :

  • planche de décalcomanies Réf. D 801

  • planche de décalcomanies Réf. D 802

  • planche de décalcomanies Réf. D 810

  • Bande de masquage TAMIYA 6 mm

  • Bande de masquage TAMIYA 10 mm

MINIATURES PASSION :

  • Sachet de LED blanc ton chaud Réf. HL234BLATC (phares)

  • Sachet de LED rouges Réf. HL234BLATC (feux rouges)

  • Sachet de LED blanc ton chaud Réf. HL184BLATC (plafonniers)

  • Condensateurs 1000 microfarads Réf. condo 1000-25